Depuis la bataille dans la salle du trône, tu ne tenais que rarement debout. Ton armure a reçu une petite cure de jouvence alors qu’elle se trouve à tes côtés, dans ta chambre, bien loin de tes fonctions. Il y a aussi un certain corbeau qui reste silencieux et qui file souvent par la fenêtre afin d’aller se dégourdir les ailes lorsqu’il en a besoin. Pourtant, tu ne te sens pas surveiller et tu t’es habituée à cette présence depuis bien longtemps. Car il est présent même lorsque tu dors. À croire qu’il ne se repose jamais. Depuis que le Lion noir t’a blessé, tu n’arrives pas réellement à récupérer et tu es encore fortement patraque. Selon les médecins qui viennent te voir, il n’y a aucune trace de poison ou de psychotropes présents dans ton organisme. Portant une bande sur ton ventre et flanc, tu sens que cela te tire. Bref, cet enfoiré ne t’a pas loupé et tu le sais très bien. Pourtant, tu restes dans ta chambre, silencieuse et à réfléchir. Tu revois ce duel qui aurait pu te coûter bien pire, mais tu n’as fait qu’obéir à tes fonctions, tes devoirs envers Asgard et même si c’est ton premier réel combat, tu ne ressens pas la même chose que lors des entraînements. Tu ressens donc le besoin de revoir ce duel et d’y réfléchir. Tu ne sais pas l’heure qu’il est mais le temps te paraît tellement relatif maintenant.

Tu finis par te redresser en grimaçant car, bien entendu, tes plaies se trouvent exactement à l’endroit que tu dois contracter pour te mettre assise. Tu as mal à la tête, mais tu ne te plains pas et tu restes silencieuse. Bien sûr, tu entends un croassement et tu montres un sourire en coin. Tu ne l’oublies pas et tu tournes ta tête vers lui avant de poser les yeux sur lui alors qu’il te montre tout fier. Tu le reconnais bien là. « Bonjour Huginn.  Ne t’en fais pas, je ne t’oublie pas. ». Tu gardes le sourire avant de souffler à plusieurs reprises. Tu ne pouvais pas continuer à rester dans ton lit alors que ton élève est seul et que ta fonction est suspendue jusqu’à ce que tu ailles mieux. Tu ne peux pas rester comme ça. Tu dois prendre sur toi. Une fois que tu te sens prête, tu te lèves afin d’aller prendre quelque chose à manger, car même si tu es normalement alitée, tu as un petit creux. Ce qui est plutôt une bonne nouvelle. Tu ne te sens vraiment pas en forme et cela te brûle au niveau de tes plaies. Mais tu serres les dents. Attrapant quelque chose, tu finis par faire le trajet inverse. Une fois assise, tu souffles avant d’entendre frapper. Tu redresses alors la tête rapidement avant de reprendre une grande inspiration. Tu devais aller jusqu’à la porte. Une, deux… Tu poses ce que tu avais dans les mains et tu te redresses afin de marcher comme un zombie vers la porte. Tu n’attends clairement pas de visite dans l’immédiat. Arrivant jusqu’à la porte, tu déverrouilles cette dernière et tu l’ouvres. Bien sûr, tu ne t’attends pas à cette visite soudaine. Reculant de quelques pas, tu finis par te mettre à genou, malgré ton état, afin de montrer le respect qui est dû à la personne qui te rend visite.

« Altesse… ». Tu baisses alors la tête. Bien que tu sois la messagère de sa majesté, tu sais à quel point Hilda est importante pour le camp, pour les tiens et pour tes frères d’armes. Elle est celle à qui tu dois obéir, à qui tu dois répondre et à qui tu dois des comptes. Concernant Odin, il voit tout à travers alors tu n’as pas besoin de te justifier de tes actes ou de tes paroles. Mais c’est une chose que la Prêtresse ne peut pas savoir. Bien que douloureuses, tu restes à genou jusqu’à ce qu’elle te dise de te redresser. C’est donc difficilement que tu te relèves. Malheureusement, tu n’as qu’une simple chaise et de l’eau à lui proposer. Tu n’as le droit à rien d’autre. T’aidant de ce que tu trouves, tu souffles et tu fermes les yeux un moment pour contrôler la douleur qui te parcours de la tête aux pieds. Cela n’est pas du tout agréable. Marchant vers ton lit, tu étais en sueur, mais tu étais consciente et c’était le plus important. « Nhézya salue respectueusement son altesse, Hilda ! ». Cela veut dire que tu es prête à l’écouter. Tu as l’air pathétique mais cacher ton état à la Prêtresse est loin d’être une bonne idée. Assise sur ton lit, tu observes la Prêtresse et tu es prête à l’écouter.

(c) mars.

Tu es à genoux devant la Prêtresse de ton dieu, celui à qui tu as toujours fait confiance et qui te fait confiance. La douleur est présente et tu te maudis intérieurement de t’être fait avoir comme une bleue sur le dernier coup de l’ennemi. De plus, tu n’avais pas l’impression que cela guérisse. Mais tu n’es pas médecin et encore moins guérisseur et bien qu’on ne te dise rien, tu sens que cela ne va pas. Mais aujourd’hui, tu ne t’inquiètes pas de ton état. Tu te sentais à peu près bien, si ce n’est que la douleur encore présente. On lui dit de se reposer mais depuis combien de temps était tu restée en retrait de ta fonction ? Tu l’ignores et tu ne te sentais pas le courage de chercher. Pas maintenant. Pas en présence de la commandante des Ases, celui qui remplace sa majesté en absence de réincarnation physique. Telle était la loi et tu l’as connaissais au même titre que la totalité des Asgardiens, chevaliers divins ou non. Hilda était devant toi et malgré la douleur qui te tiraille, tu ne peux pas t’empêcher de lui montrer le respect qui lui ait dû. Tu ne lui manqueras jamais de respect, tu serais indigne de ton armure si cela vient à se produire et nul doute que ton seigneur ou ton allié ailé te le feront comprendre. Tu remarques alors son geste et tu te redresses avec un peu de maladresse, refusant l’aide de ta Prêtresse si cette dernière t’aide. Tu devais te débrouiller seule, ta fierté de guerrière en prenait un coup. Mais tu savais mieux que personne où étaient tes limites. Une fois redressée, tu patientes que cette dernière soit assise pour en faire de même, mais sur le lit où tu étais encore couchée quelques minutes plus tôt. Bien que tu aies refait ton lit comme tu le pouvais, ce dernier semblait aussi froid que le ton qu’utilisait Hilda.

« Souhaitez-vous boire quelque chose, ma Dame ? ». Il fallait bien entamer la discussion par quelque chose non ? Certes, tu n’es pas totalement en forme, mais tu te sentais capable d’aller préparer un peu de thé ou n’importe quelle autre boisson chaude. Bien sûr, ta chambre était à bonne température sans être trop chaude ou encore trop froide. Derrière toi se trouve une cheminée dont on entend le bois crépiter sous le feu qui le consume petit à petit. Tu aimes parfois rester devant lui pour réfléchir, surtout quand la nuit tombe. Mais, tu n’es pas seule. Le ton froid de la Prêtresse s’adresse à toi en te demandant comment allaient tes blessures. Elles guérissent lentement mais sûrement. Bien sûr, tu as toujours de la fièvre, mais tu ne te laisses pas abattre pour si peu. Cela ne serait pas la première fois. Tu places tes mains sur tes cuisses alors que tu es encore en tenue de nuit avec une robe de chambre longue. Tu restes silencieuse un moment avant de lui répondre avec franchise.  « Selon les guérisseurs, mes blessures cicatrisent lentement mais sûrement… ». Tu t’abstiens de parler de la fièvre qui s’invite de temps à autre. Tu baisses la tête baissée et tu n’apprécies pas vraiment d’être dans cet état, vraiment pas. Hilda s’était adressé à toi avec un ton neutre et tu te dois de l’écouter. Puis, après lui avoir donné de tes nouvelles, elle entame la raison de sa visite.

Il faut que les évènements n’ont pas été en ta faveur. Tu savais que cela allait arriver, mais pas alors que tu es dans cet état. Seulement, elle avait fait le déplacement pour t’entendre, te justifier. Tu devais lui rendre des comptes. Tu te sens encore plus mal à l’aise quand bien même tu ne le montres pas. Dès le lendemain de ta vérification, la barrière a lâché, te désignant presque automatiquement comme responsable, comme traîtresse. Tu redoutais d’ailleurs qu’on te voit comme telle. Mais si c’était vraiment le cas, tu sais que Huginn aurait déjà fait le nécessaire. Or, aux dernières nouvelles, l’armure qu’on me prête est toujours là. Tu prends une grande inspiration avant de reprendre la parole. Elle t’avait demandé des explications et tu lui dois. « J‘étais accompagné par le chevalier Helgi. Lors de notre dernière réunion, je me suis demandée comment votre agresseur et l'assassin de votre sœur sont parvenus à rejoindre le Palais sous nos yeux. Le sachant maître runique, j’ai tenu à l’accompagner pour le seconder. On a fait le tour de tous les endroits clés de la barrière protectrice… Tout au long de notre vérification, aucune défaillance n’a été détectée. Et je n’ai rien vu d’alarmant dans le comportement de notre frère d’armes. ». Tu lui as dit la vérité et jamais, tu n’oserais jamais lui mentir. Ce serait une honte pour elle ne serait-ce que d’y penser. Le mensonge ne fait pas partie de toi. Pourtant, tu te sens quand même coupable de ce qui s’est passé. Tes frères d’armes ne seraient pas morts si tu avais vu que la barrière faiblissait. Les mains sur tes cuisses, tu attrapes le tissu et tu serres tes mains. De plus, dans ton état, tu ne peux même pas aller vérifier par toi-même.

« Je ne sais pas ce qui s’est passé avec la barrière. Je ne suis pas une experte en runes… ». Tu ne serais pas capable de savoir si le camp adverse avait quelqu’un pour les aider à travers. Mais si cela est vrai, alors cela expliquerait comment l’agresseur d’Hilda et l’assassin de Freya sont entrés sur le territoire nordique d’Odin.

(c) mars.